La Seine-Saint-Denis et les emprunts toxiques...
L'analyse des comptes du département de la Seine-Saint-Denis demandée par son nouveau Président, Claude Bartolone, révèle au moins autant de mauvaises surprises que l'audit sur les finances de la ville de Montreuil. Claude Bartolone a ainsi expliqué aux Echos (voir l'intégralité de l'article ci-dessous) à quel point les emprunts souscrits par le département de la Seine-Saint-Denis (qui est, rappelons-le, le plus endetté de France) étaient aventureux. J'ai souvent pensé que la précédente équipe de direction du département avait autre chose à faire que d'organiser des colloques sur la situation des finances des collectivités locales. Malheureusement, les faits confirment aujourd'hui mes craintes...
LES ECHOS- lundi 20 octobre 2008
Arrivé en mars à la tête du département, Claude Bartolone (PS) a découvert une dette composée à 97 % d'emprunts qu'il estime « toxiques ». Il dénonce l'attitude des banques, le laisser-faire des pouvoirs publics et l'inconscience des élus.
La Seine-Saint-Denis prise au piège des « emprunts toxiques.»
Comme baptême du feu, Claude Bartolone pouvait espérer mieux. Pour son premier débat d'orientation budgétaire.(DOB), le nouveau président PS du Conseil général de Seine-Saint-Denis mettra les élus devant une réalité qui peut s'avérer douloureuse. Celle d'une collectivité, susceptible, quasiment du jour au lendemain, de sombrer dans d'importantes difficultés financières. « Notre dette, dont l'encours s'élève à 864 millions d'euros, est constituée à 97 % d'emprunts toxiques. Notre annuité de remboursement peut passer brutalement de 40 à 80 millions d'euros », s'emporte l'ancien ministre de la Ville de Lionel Jospin.
L'élu peine à se remettre de sa découverte: « Nous avons des prêts dont les taux sont indexés sur le yen, le dollar, le franc suisse et même sur le taux d'inflation américain. »Et de mettre en cause l'ancien exécutif, présidé par le communiste Hervé Bramy, pour avoir systématisé le recours aux produits structurés. Des emprunts proposés à des taux très alléchants, mais qui deviennent révisables à l'aune des événements auxquels les banques les ont adossés, comme l'évolution d'une devise par rapport à une autre ou celle d'un indice économique. Les collectivités les moins à l'aise financièrement, comme la Seine-Saint-Denis, se sont laissé séduire par les banques, qui, sous couvert de renégocier leur dette, ont multiplié ce type d'offres au début des années 2000.
« J'ai, de mon côté, limité l'accès à ce type de prêts dès la première ou la deuxième année de mon mandat », se défend le communiste Hervé Bramy, à la tête du conseil général de 2004 â mars 2008. « Et je rappelle qu'ils ont tous fait l'objet d'un vote unanime en commission permanente. A l'époque, personne n'avait bien perçu les difficultés qu'ils pouvaient poser », reconnaît l'ancien président, qui dénonce aussi la pression des banques pour fournir ces produits.
En y cédant, « les élus ont légué à leurs successeurs un risque au moins équivalent à celui des "subprimes" », tonne Claude Bartolone. La Direction du budget et la Direction générale des collectivités locales (DGCL) n'auraient, selon lui, jamais dû laisser passer ce type d'emprunts, qui porte atteinte au principe de sincérité budgétaire. L'élu francilien met également en cause le comportement des banques, au premier rang desquelles Dexia, « l'inventeur du produit », dont il attend qu'elle« répare les dégâts avant la catastrophe budgétaire ».
Faibles marges de manœuvre
Pour y échapper, le Conseil général de Seine-Saint-Denis compte aussi sur lui-même. Toutes les occasions de réaménager la dette pour revenir à du taux fixe seront saisies, même si elles se font rares. A l'occasion du DOB, le nouvel exécutif présentera un rapport listant les postes où des économies pourront être réalisées. «Nous placerons le curseur à l'endroit qui nous parait le plus raisonnable », indique laconiquement Claude Bartolone. Mais les marges de manœuvre sont minces, voire nulles au chapitre des dépenses sociales. La Seine-Saint-Denis, du fait des populations défavorisées qu'elle concentre, ne peut pas se dérober. A elle seule, la charge du RMI absorbe près du quart du budget de fonctionnement (294 millions d'euros sur 1,3 milliard d'euros) et 146 millions de recettes manquent à l'appel. « Ce sont les dépenses non compensées par l'Etat sur cette nouvelle compétence », explique l'élu francilien. Les rentrées fiscales s'annoncent moins bonnes. Déjà, avec la crise de l'immobilier, le département a perdu, de juillet 2007 à juillet 2008.4 millions d'euros sur les droits de mutation. Quant au taux de la taxe professionnelle, il est à son maximum. Au point d'ailleurs que la collectivité doit rendre 30 millions d'euros de ticket modérateur à l'Etat
JOËL COSSAROEAUX ET ISABELLE FICEK
Les commentaires récents